L'affranchie premier roman de Claudia Cravens, mon avis sur ce western féministe jubilatoire

L’affranchie de Claudia Cravens : Un western féministe aux codes bousculés

Claudia Cravens nous propose un western au féminin dans son premier roman L’affranchie paru aux éditions Les Escales. Elle nous livre une histoire forte et une réinterprétation jubilatoire qui bouscule ce genre très masculin. Un monde où les femmes prennent leur destin et leur liberté en main et redéfinissent les règles du jeu. À travers le parcours de Bridget, jeune femme rebelle à la chevelure flamboyante, c’est toute une époque qui s’illumine sous un nouveau jour. Découvrez à travers cette chronique littéraire, pourquoi vous devriez lire ce roman qui m’a marqué.

Couverture du premier roman L'affranchie Claudie Crevens, l'autrice américaine diplômée au Bard College.

L’affranchie

Autrice : Claudia Cravens
Traductrice : Carine Chichereau
Editions : Les escales
Nombre de pages : 352 pages

Résumé du livre : Bridget, une jeune fille, orpheline mais à la forte personnalité, se retrouve sans ressources ni avenir dans le Far West. A Dodge City, son chemin croise alors la patronne du Buffalo Queens. Le seul bordel de la ville dirigé par des femmes. Elles vont lui offrir un emploi et une nouvelle vie avec le gîte et le couvert. Au sein de cette maison, Bridget découvre un foyer chaleureux, des amitiés sincères et s’éveille à ses propres désirs. Cependant, des menaces extérieures planent sur le Queens, plongeant la jeune femme dans une tourmente où elle devra choisir entre ses passions et sa loyauté.


Dans le temps, j’ai fait la putain à Dodge.

Incipit du premier roman L’affranchie de Claudia Cravens

Résumé de ma critique

Pour celles et ceux qui n’auraient pas le temps de tout lire

📖 Histoire

– Un roman d’aventures queer entre conflits, sororités au cœur d’un bordel.
– Les codes du Far West sont réinventer puisque les femmes prennent une place importante dans l’histoire.
– Un récit à la première personne du singulier, avec le regard de Bridget.

👥 Personnages

– Une protagoniste, Bridget, parfois naïve, mais qui évolue au fils du roman.
– Des femmes fortes dont Constance, celle qui deviendra sa meilleure amie, un réel soutient émotionnel dans toute cette épreuve.
– Jim Bonnie, apporte une dimension intéressante à l’histoire et nuance les personnages masculins souvent dangereux.

👀 Thématiques

– Ce Western aborde des conditions des femmes dans un monde (et un genre) très souvent masculin. Comment font-elles leur place ?
– La sororité dans un milieu concurrentiel.
– La quête identitaire à travers plusieurs prismes : la sexualité, le corps et l’appartenance à un groupe.

💖 Un premier roman très divertissant et qui m’a tenu en haleine. Il a su me surprendre grâce à quelques rebondissements inattendus.

Une plume captivante, un destin audacieux

Quand j’ai ouvert les premières pages de ce premier roman, je me suis laissée porter par la narration fluide et immersive de l’écrivaine. Cependant, je ne savais pas réellement où l’histoire me conduirait. L’histoire se déroule petit à petit sans s’apercevoir du danger. Pourtant, il s’agit bien d’un roman d’aventure, avec ses courses poursuites et ses affrontements. C’est à l’aide d’un langage cru et d’une d’écriture habile que nous allons être propulsés dans une nouvelle dynamique. Le rythme s’accélère alors, et l’on se retrouve happé dans un tourbillon d’émotions et d’aventures.

La narration à la première personne nous permet de comprendre la protagoniste et son regard : tantôt naïf, tantôt lucide. Ainsi, Claudia Cravens excelle dans la description du quotidien au Buffalo Queens, ce bordel à l’atmosphère chaleureuse. On y ressent toute la vie qui s’y déploie, loin des clichés habituels sur la prostitution dans le Far West.

La sororité au service des affaires

On rencontre plusieurs personnages dans ce roman. Tout d’abord, la protagoniste principale : Bridget. L’héroïne marque les esprits. Sa flamboyante chevelure rousse attire l’œil et n’est que le reflet de son caractère de feu. C’est un personnage profondément humaine, tant elle est déterminée avec son sens de la débrouille, mais aussi naïve et vulnérable. Mais, alors que cette naïveté peut quelque peu nous énerver au début du livre, elle mue peu à peu en une vision plus mature, sans jamais perdre se qui la caractérise.

Autour d’elle gravitent des personnages féminins tout aussi fascinants dont Lila, Sallie ou encore Spartan. Mais c’est celle qui va devenir sa meilleure amie qui m’intéresse ici, Constance. Elle devient un pilier émotionnel qui l’aide à naviguer dans cette nouvelle vie. Cette femme est dépeinte avec une profondeur qui dépasse le simple rôle de confidente. Loin des clichés d’une prostituée inculte et peu curieuse, au contraire, elle a toujours un livre dans les mains. Tandis que la relation qu’elle créé avec Bridget, faite de complicité et de soutien mutuel, illustre parfaitement la force des liens féminins. Ce qui frappe, c’est la façon dont ces personnages féminins sont dépeints comme indépendantes, sans jamais tomber dans la caricature. Chacune évolue à son rythme, avec ses motivations et ses blessures à guérir.

Quelques personnages masculins peuplent cette œuvre, dont son père mais surtout le shérif Jim Bonnie. Il protège tout en étant un client régulier du Buffalo Queens. Ce personnage apporte une dimension intéressante à l’histoire et une nuance aux personnages masculins souvent dangereux. Il est à la croisée des chemins entre la loi officielle et la protection d’un établissement marginalisé. Cela permet ainsi de soulever des questions sur la justice et les compromis nécessaires dans une société en mutation.

Entre quête identitaire et dénonciation de la condition des femmes

Ce premier roman aborde plusieurs thématiques contemporaines. Tout d’abord, celle de la condition des femmes dans un monde (et un genre) d’hommes. Claudia Cravens offre une réflexion nuancée sur la prostitution, loin des jugements moraux. Elle montre comment certaines femmes, dans un contexte où leurs options étaient limitées, ont pu trouver une forme d’autonomie et une perspective d’avenir à travers ce travail. En parallèle, s’ajoute donc, l’émancipation des personnages féminins. En effet, elles prennent leur destin en main, défient les conventions et créent leurs propres règles. Cette vision queer du Far West résonne étonnamment avec nos préoccupations contemporaines sur l’égalité des genres et de l’autodétermination.

De plus, la sororité est un élément central du récit. Le Buffalo Queens n’est pas qu’un lieu pour travailler, c’est également un foyer, voire parfois une famille choisie. Les liens qui se tissent, entre ces femmes aux parcours divers, sont d’une authenticité bouleversante. Elles s’entraident, se protègent, se soutiennent dans un environnement souvent hostile. Et bien sûr, comme dans toutes les familles, il y a parfois des conflits, des rivalités mais elles peuvent compter les unes sur les autres.

Et enfin, l’une des thématiques les plus importantes du récit, celle de la quête identitaire et de l’appartenance. Bridget est propulsée dans une réalité difficile. Cependant, son parcours illustre la façon dont nous construisons notre identité à travers les rencontres, les relations et les choix. C’est également à travers la découverte de sa sexualité, de son désir et de son corps qu’elle va se construire en tant de femme et trouver sa place.


L’Affranchie de Claudia Cravens a réussit l’exploit de revisiter le western avec un regard contemporain, sans jamais trahir l’esprit de cette époque fascinante. La plume de l’autrice, à la fois sensible et énergique, nous offre une histoire captivante qui résonne bien au-delà du cadre historique dans lequel elle s’inscrit. J’ai été particulièrement touchée par la façon dont ce roman dépeint la force des relations féminines. Ainsi que la quête d’indépendance dans une société qui ne laisse que peu de place aux femmes. Ou en tout cas, une place de soumission uniquement aux services des hommes. La dimension queer, traitée avec sensibilité, ajoute une richesse supplémentaire au récit. Serait-ce un best seller dans le nouveau genre du western féminin moderne ? 

Je recommande vivement cette lecture, à celles et ceux, qui veulent s’aventurer dans un western queer et féministe. Un coup de cœur indéniable qui fait réfléchir sur notre société et sur ceux qui ont choisi une voie différente.

Comments

2 réponses à “L’affranchie de Claudia Cravens : Un western féministe aux codes bousculés”

  1. […] Découvrir la chronique […]

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